Nouvelles singulières de Charlie Barette. D’abord il y a un ton. Des descriptions picturales sous une plume ondoyante côtoient des âmes échouées par la vie jusqu’à leur rédemption. Et derrière ce ton, un questionnement. L’homme est-il prédestiné à son propre destin ? Peut-il changer le cours des choses ? Ou bien est-il soumis à l’acceptation de sa normalité, puisse-t-elle lui coûter ? Dans la chaleur d’un été marseillais, un homme se dresse devant une vengeance. Un huis clos surréaliste où flottent les notes acidulées d’Éric Satie. À la fin de la guerre, un peintre andalou persécuté par les franquistes, retrouve la source de son inspiration sous les traits d’une chanteuse de tango. Une nouvelle comme une apparition imprévue, un atavisme meurtrier, une colère sous la lave. Un vaniteux publicitaire se réveille sous le plus vieux pont de Paris dans un pyjama brodé au milieu des sans-abris. Certaines choses changent, d’autres jamais. Un texte acide sur un monde présomptueux et aveugle. Cinq nouvelles qui serpentent dans les méandres de l’âme humaine, les courbes et les détours qui amènent inéluctablement devant son propre miroir libérateur. L’office fait l’homme. Certains destins dévoilent au contact de la réalité de sombres desseins ou développent une magie sans explication. François Roche alias Charlie Barette est né à Casablanca en 1962. Après une carrière dans la presse et le design, toujours à mi-chemin entre l’image et l’écrit, il s’est tourné vers une deuxième vie artistique : auteur de nouvelles et photographe abstrait. Amoureux de la nouvelle, de son immédiateté, de sa structure, Les pieds de ma mère est son premier recueil publié. Nouvelle, storie, cuento, racconti, un genre caméléon qui tient en trois mots : concision, tension, crise. Une courbe narrative tendue comme un arc où l’absurde et la poésie apparaissent parfois. Ses photographies sont un prétexte à l’écriture et le moyen de dévoiler son travail, comme autant de portes entrouvertes sur la littérature. Influencé par Raymond Carver et Roland Topor, pour l’écrit, Alexandre Rodtchenko et Man Ray, pour la photographie, il choisit ses sujets pour mettre en valeur la beauté d’un détail ou d’un mouvement, d’un instant de vie. Charlie Barette bouscule à chaque nouvelle un ordre établi qui amène le lecteur face à un double miroir où la zone de pénombre laisse place à une possible rédemption. Une écriture poétique et artistique à savourer avec tact.

Ed. L’échappée belle – 04/06/2020

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