Nous étions devenus amis au point qu’un jour je lui demandai de me confier un de ses manuscrits. Il fit bien des manières, mais à la fin, il accepta. «Hors commerce». C’était le titre.» Il pourrait également très bien créer, dans sa nouvelle intitulée «Hors Commerce», le personnage de Lavergne, en utilisant et réunissant des caractéristiques de ses aînés écrivains, Delancourt parrain pervers et Boinel frère ou faux frère. Naturellement, il modifierait aussi mon propre personnage et le sien, en les transformant en figures de fiction. Mais pour l’essentiel, il nous y réunirait comme nous l’avions été dans la vie (comme j’ai imaginé que nous l’avions été dans la vie). Et il imaginerait, pour finir, que j’avais écrit un récit autrefois, à l’époque de notre amitié, et qu’il me conseillerait à son tour, comme je l’avais fait pour lui quelques années plus tôt, d’en faire ce petit livre. Ce dernier opus, écrit plus de trente après Voyage sentimental (que nous avions publié en 1986), lui aussi détaché du labyrinthique cycle de «Jordane», aborde d’une manière encore plus singulière et profonde le versant majeur de toute la littérature de Jean-Benoît Puech : il arrive parfois que les obscurités soient mises en lumière sans être dissipées. Comme si ici le retrait habituel de l’auteur en d’infinies figures éclatées, «hétéronyme intégriste» ou «homonymes qui composent», faisait volte-face pour reprendre possession de son devoir d’existence.

Ed. Fata Morgana (23/09/2017)

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