de Camille Narduzzi, élève de troisième au collège Notre-Dame de Montauban.

Prix Jeunesse de la nouvelle – Lauzerte 2019
Concours scolaire 2019 d’écriture de nouvelles – la métamorphose

Ce jour-là

Ce jour-là, le soleil se levait seulement sur la ville de Toulouse. Mathieu, un garçon de 20 ans, plutôt grand, avec des cheveux courts d’un brun ténébreux et de grands yeux noirs, marchait souriant, chantonnant un air de Johnny Cash. Il était jovial, à l’écoute de chacun de ses amis, accueillant et assez bavard. C’était quelqu’un de calme et chaleureux, d’honnête et curieux. Il était gentil, rêveur, sensible… Il avait une vision magnifique de la vie.
Il avançait dans la rue des Trois Renards, et il reconnut l’un de ses collègues à cent mètres de lui. C’était Charles, un homme d’environ 35 ans, petit blond avec des lunettes rondes et des taches de rousseur. Il était très sympathique et tout le monde l’appréciait.
Le chemin s’assombrissait. Il faisait gris et un épais brouillard se posa sur la rue. On entendait le crépitement de la pluie qui tombait des gouttières. L’air glacé remplissait ses poumons. Mathieu détestait le froid et l’humidité ; En y réfléchissant il ne se souvenait plus pourquoi il était sorti ce jour-là. Mais il continuait d’avancer comme un somnambule.
Au loin Charles commençait à osciller et à ralentir. On entendait encore le bruit d’une vieille moto qui criait dans les alentours. Mathieu arriva à dix mètres de lui, il jeta un léger coup d’œil sur sa montre qui affichait 6h02.
Son collègue se retourna le sourire aux lèvres et lui fit un signe amical de la main pour le saluer. Sa bouche était entrouverte, il allait dire quelque chose. Mais à vingt mètres d’eux, un homme avec une cagoule noire sortit une arme et tira. La balle partie droit vers Charles, traversa sa peau et perça son cœur :
Immobile, il tomba inerte sur le sol.
L’homme partit en courant.
Mathieu ne comprenait pas. Il avait immédiatement appelé la police et les secours : les cris des passants, le hurlement des sirènes, tout tourne dans sa tête en faisant un énorme brouhaha, puis tous ces regards fixant le corps ensanglanté de son ami… Cet événement avait été un réel traumatisme. Il commença petit à petit à couler et personne ne lui jetait de bouée. Aucune main tendue, aucune chance, aucune lueur d’espoir. Il revoyait cette scène en boucle dans sa tête et des milliers de questions le hantaient : « Pourquoi Charles ? »,  » Pourquoi l’homme en noir avait-il tiré ? », « Pourquoi était-ce lui le seul témoin ? »
STOP !
Il ne devait pas se laisser submerger.

Alors il avançait étape par étape.
D’abord, il fut accablé. Il avait vu son ami mourir. Ainsi il s’assombrissait, sa joie disparaissait.
Le petit garçon épanoui était abattu, la balle aurait pu le toucher… Pourquoi pas lui ? Et si c’était bientôt son tour… Et ce malheur qui lui tordait le ventre en faisant descendre sur ces joues des petites perles d’eau.
C’est pourtant si beau… Une larme…
Mais ses yeux devenaient rouges et cela continuait de couler encore et encore… Et puis plus rien, la douleur de brûlure à cause du sel contenu dans les petites gouttes qui humidifiaient son visage était trop forte et les empêchait de couler. Mais ce n’était qu’un détail physique. Lui, il voulait que TOUT s’arrête. Comme cela devait être agréable de ne plus rien ressentir. Le vide, le néant… Un trou noir.
Voici son premier démon :
Bonjour, Tristesse.

Ensuite, il se laissa étouffer par la haine. De quel droit cet homme avait-il osé lui prendre son ami ?
Avant il était bienveillant, toujours là pour les autres. Mais il devenait bilieux et s’enfermait dans sa colère. Il était acariâtre et indifférent avec ses amis.
Pour lui plus rien n’avait de sens.
Plus le temps passait, plus la rancœur s’installait.
Il frappait contre les murs, ces mains étaient couvertes de sang à cause de la force qu’il mettait dans ces coups. Il extériorisait sa colère jusqu’à ne plus avoir de voix.
Il se rendit vite compte de l’hypocrisie des gens qui l’entouraient. Toutes ces personnes qui lui avaient promis d’être là quoiqu’il arriverait. Où étaient-elles maintenant ?
Il était perdu et on lui tournait le dos.
C’était un enfer pour lui, cet enfer où Satan est en chacun des hommes ; son nom : la vie.
Et voici son second démon :
Bonjour, Animosité.

Après tant d’agressivité, la suite était l’envie de vengeance. Retrouver le coupable ! Le tuer ! IMPOSSIBLE ! Comment savoir qui c’était ?
Il s’égarait, tournait en rond, sans trouver la moindre réponse.
Et ce noir désir l’envahissait.
Il se cloîtrait dans la démence, il hurlait qu’il le ferait périr. Il ne s’arrêtait plus.
Tout lui semblait dérisoire et cela lui était insupportable. Tout son côté obscur ressortait.
La belle princesse devenait le dragon.
La porte de son appartement restait fermée à clé et il interdisait quiconque de la franchir. Seul, face à lui-même ou plutôt face à celui qu’il était en train de devenir. Enfermé avec la foule de sentiments qui l’encerclaient.
Il se consumait petit à petit.
Alors on y est, notre troisième démon :
Bonjour, Folie.

Il ne se contrôlait plus et tombait dans l’anxiété.
Il était tard, il était seul, allongé sur son lit, et tout d’un coup, calme et sérénité disparurent. Il sentit un grand frisson traverser son corps.
Il tremblait et ses larmes se mirent à couler, encore une fois…
Il était paralysé par la peur qui lui tordait le ventre et il lui était impossible de dormir ou même de bouger.
Puis il se mit à hurler de plus en plus fort, à crier qu’il fallait que TOUT s’arrête !
Il ressentait de plus en plus ce vide atroce. Ce vide qui lui serrait le cœur et bloquait sa respiration.
C’était l’entrée spectaculaire de notre quatrième démon :
Bonjour, Angoisse.

C’était seulement maintenant qu’il pensait à se protéger.
Il essayait de refouler ses émotions et de refuser la réalité.
C’était u jeu, une blague. Charles allait revenir et sonner à sa porte.
Il tentait de supprimer chaque souvenir avec acharnement. Mais plus il essayait d’oublier, plus il y pensait.
Il luttait contre lui même.
Son estomac se nouait de plus en plus fort, son cœur battait de plus en plus vite et sa tête brûlait de plus en plus intensément.
Une partie de lui s’était brisée et un abîme s’était ouvert.
Tout tournait autour de lui, il se sentait tomber dans un grand trou sans fin. Il ne savait plus comment il allait s’en sortir et il ne voulait plus entendre parler de Charles.
Il était perdu et alla se réfugier chez notre cinquième démon :
Bonjour, Déni.

Au bout de quelques jours, il finit par l’accepter : Charles était mort ‘était l’inexorable vérité.

Et voilà notre dernière phase :
Il était devenu maussade. Son teint basané était blanc et gris comme les nuages qui couvraient le ciel.
Il ne croyait plus en rien et était dubitatif sur le sens même de la vie.
Cet homme, auparavant, si agréable faisait preuve d’une extrême froideur et de beaucoup de nihilisme.
On aurait dit qu’une connivence s’était créée entre lui et ses démons. Il finissait par rentrer dans une routine nocive, par s’habituer à leur présence.
Il devenait taciturne et préférait vivre reclus entre sa chambre et son salon.
Il était glacial, ses rideaux toujours fermés, il fuyait le soleil. Toujours en train de pleurer, crier, puis à brusquement de s’endormir.
Alors ; Bonjour, Dépression.

Ce jour-là, le soleil n’était pas très visible à cause du mauvais temps, Mathieu était sorti. Il marchait les yeux rivés sur le sol en chantonnant un air de Johnny Cash.
Il était glacial, indifférent et défaitiste.
Il avançait dans la rue Bouquières, et il reconnut l’un de ses collègues à cent mètres de lui. C’était Charles, un homme d’environ 35 ans, petit blond avec des lunettes rondes et des taches de rousseur. Il était très sympathique et tout le monde l’appréciait.

Le chemin s’éclaircissait et le soleil se leva enfin. Il déversait ses rayons sur notre petite planète. On entendait le chant mélodieux des oiseaux ayant fait leurs nids dans de grands chênes. L’air se réchauffait et il avait de plus en plus chaud. Mathieu adorait l’été ; Mais en y réfléchissant il ne se souvenait plus pourquoi il était sorti ce jour-là.
Mais il continuait d’avancer comme un somnambule.
Au loin Charles commençait à osciller et à ralentir. On entendait encore le bruit d’une vieille moto qui criait dans les alentours. Mathieu arriva à quinze mètres de lui, il jeta un léger coup d’œil sur sa montre qui affichait 7h02.
Son collègue se retourna le sourire aux lèvres et lui fit un signe amical de la main pour le saluer. Sa bouche était entrouverte, il allait dire quelque chose. Mais à vingt-cinq mètres d’eux, un homme avec une cagoule noire sortit une arme et tira. La balle partie droit vers Charles, traversa sa peau et perça son cœur :
Immobile, il tomba inerte sur le sol.

Encore une foi, l’incompréhension, les cris des passants, le hurlement des sirènes et tout tourne dans sa tête, les yeux une nouvelle fois rivés sur le corps ensanglanté de son ami…

Pour ce qui en est des démons, nous avons tous les nôtres, enfouis tout au fond de nous et il suffit d’un élément déclencheur pour les faire sortir. Alors vous, quel démon avez-vous rencontré ?

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